L’oeil éclos #22

Terence Koh, Untitled (white head), 2006, © Collection Francès

Une boîte en verre renfermant un crâne blanc, la bouche grande ouverte. Que symbolise-t-il ? Une personne ? Une société ? Une revendication ? Il n’y a aucun indice, aucun détail qui ne réponde à la question. Pourtant, l’artiste a fait le choix de représenter ce crâne la bouche grande ouverte, percé, laissant entrevoir la lumière à travers le verre. Un cri puissant, mais étouffé dans sa cage de verre, ainsi inaudible pour le spectateur.

Tout ici est fragile. De la boîte en verre, à ce crâne blanc. Théâtralisé, tout peut basculer au moindre mouvement, se briser. Une tension qui se répète dans cette fragilité. On peut sentir que les vibrations d’un trop grand cri pourraient casser cette boîte et ce crâne. Ainsi, sommes-nous capables de nous séparer de notre environnement, constitué par notre quotidien, par nos habitudes ? Sommes-nous prêts à briser ce verre ?

Réalisée en 2006, cette œuvre de Terence Koh fait écho aux sujets d’actualité que nous traversons. Nous retrouvons le sujet de l’enfermement. Libre et à la fois confiné dans cet écrin de verre. Ce memento mori moderne nous invite à nous interroger sur notre relation avec notre environnement. Cette phrase latine traduite par « Souviens-toi que tu es mortel », illustrée par les artistes dès le XVIIème siècle, nous plonge dans une réflexion sur notre propre existence. L’individu se transforme continuellement. Or cette conscience individuelle n’est pas toujours en accord avec l’environnement qui nous entoure.

Cette boîte est close, mais transparente, se fondant dans l’espace où elle se trouve. Nous sommes liés à tout ce qui se passe dans notre quotidien et dans notre environnement : il fait partie de nous. Sa préservation est vitale ainsi un équilibre doit être trouvé. L’impact d’un mouvement sur le verre influe sur le crâne, à l’instar de notre relation avec l’environnement. Pour notre survie, il faut préserver notre entourage et cela ne peut se faire qu’à travers l’attention portée aux autres, une douceur et une sensibilité quotidienne.

Ainsi, je trouve ici que Terence Koh, nous met face à une tête construite de peu et pourtant avec une forte portée symbolique. Ce choix de la simplicité, nous permet en tant que regardeur, de nous interroger plus librement sur l’œuvre, il simplifie son appropriation, et interpelle métaphoriquement sur notre environnement et sa préservation. Cette œuvre permet de nous arrêter et de prendre du recul. De nous questionner sur la fragilité de l’être. Nous sommes face à une métaphore de nous–même en somme. Une réflexion particulièrement intéressante qui peut faire écho à l’œuvre de Benoît Maire, Socrate 2, placée à proximité.

Retrouvez l’article dédié à l’artiste sur le site de la Fondation Francès 

Imprimer