#L’œil éclos n°17

Marine, 19 ans, en service civique avec La Fabrique de l’Esprit® nous offre son regard sur les œuvres de la collection Francès.

 

David LaChapelle, « Naomi Campbell : Have you seen me? », 1994,  © ADAGP, PARIS, 2019 / © David LaChapelle provenant de la Fondation Estelle et Hervé Francès

 

Autour d’une table, une famille dîne sans un mot, les yeux rivés sur l’écran fixé au mur devant eux. Les regards ne se croisent pas, ils sont hypnotisés par les images qui défilent, les couleurs vives et les sons enchanteurs. Sans s’en rendre compte, cela fait maintenant dix minutes qu’ils regardent des publicités, aussi captivés que si ça avait été leur série télévisée. L’écran devient noir. Une porte de frigo s’ouvre devant eux et la caméra en sort, découvrant une femme chocolat étendue sur le sol froid. L’image tourne autour de la femme qui fixe l’objectif, les lèvres entrouvertes. Elle vide une brique de lait sur sa poitrine, provocante, sensuelle. L’image redevient noire, et la marque du lait s’affiche à la place, avec son petit jingle reconnaissables entre tous.

Le lendemain, la femme va faire les courses. Elle a besoin de lait, prend la brique qui lui paraît la plus attirante. Sans le savoir, elle s’est laissée influencer.

Choquante, provocante, Naomie s’étend face à nous et dans une mise en scène calculée dresse un tableau peu avantageux de notre société de consommation. Bien plus significative d’une scène sensuelle quelconque, avec ses couleurs vives et ses briques de lait décorées du visage de la femme, cette photographie nous dévoile le vrai visage des publicités de notre quotidien. Jusque dans notre frigo, des stars s’invitent et nous poussent à acheter, encore et toujours, sans la moindre modération. Des éclaboussures, les vagues d’émotions provoquées par les images peintes sur le mur bleu. Nos sens sont assaillis, nos avis manipulés pour devenir consommateurs d’effigies et non de produits.

Le tableau a choqué son public, il fait réfléchir et réaliser le fonctionnement pervers de la société de consommation, auquel on s’est un peu trop habitué pour y prêter attention.

Je trouve l’œuvre ensorcelante, fascinante mais un peu effrayante. Le mannequin représente une minorité de personnes placées au-dessus de nous, que notre société essaie de transformer en généralité. La femme objet, parfaite. Le rapport avec les produits que l’on achète est présent, on veut faire comme ces personnalités célèbres, leur ressembler, et parfois inconsciemment on change notre façon de vivre pour adopter la leur.

 

Retrouvez l’article dédié à cette œuvre sur le site de la Fondation Francès

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