Artistes

Retour sur l’exposition : « Le temps d’un souffle »

Retour sur l’exposition : « Le temps d’un souffle »

Du 4 février au 25 mars 2023 s’est tenue une étonnante exposition. Intitulée « Le temps d’un souffle », le couple d’artistes Cat Loray et Clément Borderie ont présenté leurs œuvres dans l’église Notre-Dame de l’Assomption de Valloire. Une grande bâtisse baroque du XVIIème siècle. La singularité des œuvres vient s’implanter presque se confondre dans les murs, dans la nef, dans les hauteurs de l’église. Un challenge stimulant pour les artistes qui ont dû s’approprier un endroit peu commun.

Cat Loray a pu installer son Virga comme une pluie statique sous la chaire à prêcher, ou encore ses cloches suspendues qui viennent retracer la voûte centrale. Nous y retrouvons d’autres de ses sculptures, parfois discrètes comme un jeu de piste ou parfois déroutantes comme l’étonnante suspension dans le confessionnal. De son côté Clément Borderie vient investir les murs d’une nature imprégnée dans la toile, avec sa « Cuve » circulaire comme une lune immobile, ou encore sa série « Sinusoïde » qui tout le long de ce mur invite à la contemplation. Également, nous retrouvons une de ses pierre de sel, posée religieusement sur l’autel, venant honorer le rapport de l’art à l’artisanat, un geste fort.

Cette exposition s’est avérée ludique et intrigante, proposant  aux visiteurs une expérience artistique nouvelle par la confrontation de plusieurs mondes.

 

Retour sur les artistes :

Cat Loray :  Née en 1962 à Nice, Cat Loray vit et travaille à Paris. Elle est diplômée des Beaux-arts de Marseille et des Arts décoratifs de Nice.

Sa pratique artistique repose sur l’observation du monde qui nous entoure. Intimement liées aux mondes sensible et organique, ses réalisations touchent autant à la sculpture qu’à l’installation, au dessin qu’à la peinture, et invitent celui qui en fait l’expérience à une immersion presque sensorielle. L’artiste considère ces moyens d’expression artistique de manière indissociable, dans une logique d’effacement des frontières.

Elle retranscrit des sensations et des perceptions dans une volonté de transmission de l’essentiel. Ses formes plastiques à la jonction entre pureté et minimalisme, planéité et profondeur, accordent à l’espace un rôle primordial. La mise en place de ses œuvres dans l’espace d’exposition constitue un moment charnière de son processus artistique, qui vient insuffler une impulsion vitale à ses pièces.

 

Clément Borderie : né en 1960 à Senlis (France). Il est diplômé des Manufactures Nationales des Gobelins National Paris en 1983. Il vit et travaille à Paris et il est aujourd’hui représenté par la galerie Jousse Entreprise.

À la croisée de la sculpture et de la peinture, les installations de Clément Borderie explorent les  « échanges entre une forme et son environnement à travers le temps. » Cultivant une mise à distance, l’artiste met en place des dispositifs voués à capturer l’essence d’un lieu et à en traduire « l’identité spatio-temporelle ». Dans la nature, en milieu urbain ou industriel, il installe des « matrices », des structures métalliques de formes et de tailles variées, sur lesquelles il tend des toiles, des « pièges » captant les « matières sensibles » et phénomènes naturels. S’en suit une période de gestation, pendant laquelle la toile est progressivement recouverte de couches successives de microparticules donnant, à terme, corps au temps. Régie par le principe du « laisser-faire », le dispositif mis en place par Borderie rend visible l’invisible. Il en résulte des œuvres brouillant les frontières entre objet et sujet, des tableaux empreints de « l’écriture mystérieuse de la nature » (Valérie Gautier).

Son travail a été présenté à la Galerie Dumonteil, Shanghai, Chine; Gallerie Alberto Aquilino à New York; Musée Kiscelli à Budapest; Galerie Valérie Bach à Bruxelles; Musée de l’arbre Enea à Zurich; Centre d’Art La Base à Levallois-Perret, France; Château du Rivau en Touraine et Maison des Arts de Bagneux etc.

 

 

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L’oeil éclos #25

L’oeil éclos #25

Gregory Crewdson 

Untitled (Penitent Girl) (Série Twilight)

2001-2002, Ed. x/10, 54 cm x 153 cm © collection Francès

 

Une scène saisissante, qui m’apparaît comme une réminiscence de la silhouette dénudée d’Isabella Rossellini sur fond de quartier résidentiel américain, dans Blue Velvet. Un sentiment d’inquiétante étrangeté latent, que partage la photographie Untiltled (Penitent Girl) de Gregory Crewdson et le film de David Lynch. Et pour cause, il est le film qui a marqué durablement l’imaginaire de Crewdson.

Dans cette atmosphère crépusculaire, une femme éclairée par les phares d’une voiture se tient las, debout, en sous vêtements ; son corps, dont la chair semble imprégnée d’une désolation psychique ou physique, trahit le récit d’un drame intime en cours. Evoquerait-il une repentance ou un appel à l’aide ?

L’impression d’un événement ou phénomène insaisissable, passé ou imminent, donne la sensation que le drame rôde. Un étrange sentiment de malaise transparaît de cette scène et l’action qui la précède et la suit est entre nos mains, nous sommes témoins d’une histoire dans laquelle nous pouvons projeter nos propres angoisses et désirs.

La texture et la composition de l’image ainsi que le travail sur la lumière lui confèrent une qualité intrinsèquement cinématographique et laissent entrevoir qu’il s’agit ici d’une mise en scène, de la construction d’une fiction. Mais de quelle nature est-elle ? Surréaliste ou documentaire ?  Représentative de l’imaginaire sombre de Crewdson où affluent les dépictions de scènes de la vie quotidienne, les environnements nocturnes, les bouleversements du champ domestique, il se joue dans cette image, un drame psychologique contrecarrant le rêve américain.

Riches de nombreuses influences, les photographies de Crewdson évoquent aussi bien le cinéma fantastique et de suspens de David Lynch, Steven Spielberg, Alfred Hitchcock, que la peinture d’Edward Hopper, ou le style documentaire de William Eggleston et Walker Evans, entre autres. Chez Crewdson, le mystère affleure toujours, il est ancré dans un monde aux frontières du réel, entre onirisme, désenchantement, incertitude et irrationalité, où la beauté se mêle à l’étrangeté. En découle une part impénétrable qui fait des œuvres de Crewdson toute leur singularité.

 

Laure Bensoussan

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Residence internationale – Modjadji, Reine de la pluie

Residence internationale – Modjadji, Reine de la pluie

Coup de projecteur sur l’univers de Malebona Maphutse, artiste en résidence avec la Fabrique de l’Esprit à la Cité internationale des Arts de Paris.

Malebona nous invite à découvrir une partie du monde par des récits engagés qui témoignent d’une histoire sociale et culturelle complexe. C’est donc par le biais de Mamoloyi et de deux matriarches qu’elle nous guide vers des univers créatifs. Aujourd’hui, nous mettons en lumière une des matriarches : Modjadji, la Reine de la pluie. Modjadji est reine du royaume Lobedu qui se trouve au quartier Balobedu dans la province de Limpopo en Afrique du Sud. Les habitants de cette tribu, appelés les Ba Lobedu parlent le Khilobedu. La spiritualité y est très présente, ils possèdent leur propre Dieu et ont une façon singulière de prier. Ils se réunissent en cercle au sein de leur habitation et appellent le nom des ancêtres afin de recevoir une bénédiction qui leur permet d’acquérir de la chance. Un certain nombre de coutumes traditionnelles ont disparu en raison de l’impact dévastateur des missions civilisatrices, conséquence de l‘impérialisme colonial. Modjadji est la seule reine traditionnelle d’Afrique du Sud qui règne encore aujourd’hui. Elle détient un pouvoir accablant, celui d’apporter la pluie à ses amis ou de potentiellement noyer ses ennemis. Ce pouvoir lui confère un respect total de la part de tous. À la fin de sa vie, Modjadji lègue son trône à l’aînée de ses filles. Un pouvoir qui se transmet de femme en femme depuis plus de deux siècles.

 

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Visuel : Mamoloyi Healing Ministries (A Revival), Video Stills, 3 min 28 sec, 2017, courtesy de l’artiste

 

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Résidence internationale – Malebona Maphutse

Résidence internationale – Malebona Maphutse

L’artiste originaire de Johannesburg, Malebona Maphutse est en résidence à la Cité internationale des arts de Paris avec la Fabrique de l’Esprit. Pendant une durée de trois mois, elle nous invite à découvrir son univers extratemporel avec son alter-ego Mamoloyi. Au travers de courts-métrages mettant en scène ce personnage puissant, Malebona nous pousse à nous questionner sur certains éléments conflictuels du passé.

 

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Visuel : ‘Mamoloyi Ministries Present: A Holy Minister’s Production (Fuck your Fake Ass History)’ Malebona Maphutse – 2019-2020

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Clément Borderie – Résidence Art et Sciences #2

Clément Borderie – Résidence Art et Sciences #2

Depuis le mois de février, dans le cadre d’une résidence « Art & sciences », de drôles de structures ont envahies le parc écologique de Senlis

Clément Borderie, artiste senlisien, est en résidence avec La Fabrique de l’Esprit dans le cadre du dispositif Senlis, un(e) artiste.

Pour ce projet, l’artiste travaille avec la nature et a pour but, grâce à ses toiles tendues sur ses structures métalliques dénommées « Matrices », de récupérer l’empreinte du hasard de la vie naturelle du parc.

Ainsi, au fil des saisons, les toiles blanches se sont nettement transformées pour devenir de véritables œuvres d’art, imprégnées de l’essence même du lieu.

Après six mois, et une surveillance attentive de l’artiste, certaines toiles sont prêtes. L’artiste va donc les collecter et les présenter. Elles deviennent de magnifiques tableaux aux couleurs et à l’esthétique étonnante.

Pour la toute première récolte automnale des toiles, nous l’avons suivi.

 

« Ce moment, le seul où j’interviens, est toujours magique » C.Borderie

 

 

Une fois les toiles récupérées par l’artiste, le dispositif continue avec de nouvelles toiles. Elles sont au même endroits, sur les mêmes matrices mais vont affronter d’autres saisons et seront donc probablement très différentes.

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Clément Borderie – Résidence Art & Sciences

Clément Borderie – Résidence Art & Sciences

Clément Borderie, artiste senlisien, est en résidence pour La Fabrique de l’Esprit au parc écologique de Senlis

Dans le cadre du dispositif Senlis, un(e) artiste, la Mairie de Senlis proposait à Clément Borderie d’installer ses structures au cœur du parc écologique senlisien le 13 février dernier.

A l’initiative de l’artiste, la Fabrique de l’Esprit l’invite pour sa résidence Art & Sciences à développer avec lui un programme éducatif pour les écoles, collèges et lycées du territoire, pour l’année scolaire 2019-2020.

La première action de ce programme aura lieu au printemps 2019, puisque des élèves de lycée vont installer aux côtés de l’artiste les toiles sur les structures actuellement installées dans le parc, afin de recueillir les traces et sédiments de la nature au gré des journées et des saisons.

 

Le programme Art & Sciences

Depuis 2016, La Fabrique de l’Esprit explore la porosité entre arts et sciences, pour permettre au sujet scientifique de se révéler avec la création artistique, en lien avec les préoccupations environnementales actuelles.

L’association s’investit dans cette expérimentation à travers ses résidences #LeLab, qui ont accueilli Mathieu Corticchiato et Lucas Dauverge, puis Amandine Arcelli.

Elle développe aussi des programmes éducatifs sur cette thématique, avec les plus jeunes autour de l’exposition de Claire Morgan à la Fondation Francès en 2017, et avec les collèges et lycées autour de la bio-inspiration et de l’art et le vivant.

 

La résidence d’artiste

Elle permet à un artiste de développer ses recherches et sa création en immersion dans une structure, une entreprise, un atelier, ou, dans ce cas précis, un lieu ouvert. Il peut ainsi prendre le temps de travailler son processus créatif et de s’immerger dans le lieu qui l’accueille.

Au parc écologique, Clément Borderie travaillera ainsi en lien avec la nature et récupèrera, grâce à ses toiles tendues sur ses structures métalliques, l’empreinte du hasard de la vie naturelle du parc.

 

 

L’artiste               

Clément Borderie crée des installations qui s’apparentent à l’art de la sculpture et de la peinture. Il veut capturer l’essence d’un lieu, créer sa carte d’identité spatio-temporelle, et révéler ce qui est imperceptible, c’est-à-dire ces petits détails qui nous échappent ordinairement. Dans la nature, il installe des structures métalliques de formes et de tailles variées, sur lesquelles il étire des toiles. Dans ce type d’installation, il laisse les toiles réagir avec les éléments qui se traduisent par des motifs et des marquages uniques au fil du temps et de la transition des saisons. Désormais, ces toiles blanches deviennent un espace de création expérimentale.

Né en 1960 à Senlis, l’artiste est diplômé des Manufactures Nationales des Gobelins-Mobilier National Paris en 1983, et vit et travaille à Paris.

Il est particulièrement attaché à la transmission de son travail auprès du jeune public. La Fabrique de l’Esprit l’accompagne donc dans la médiation de son œuvre auprès des scolaires.

 

Les étapes du projet

Février 2019 : installation des structures dans le parc, dites « matrices ». Elles ne forment pas les œuvres, mais accueilleront les toiles au printemps.

Printemps 2019 : avec l’aide des lycéens de la région, mise en place des toiles sur les matrices, en compagnie de l’artiste.

Septembre 2019 : lancement des programmes éducatifs avec les écoles, collèges et lycées territoriaux. Les lycéens ayant posé les toiles sur les structures découvriront les premières marques de la nature sur les toiles.

 

 

Projet en évolution >> suivez notre actualité sur ce projet sur @lafabriquedelesprit, présente sur Facebook et Instagram !

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Résidence internationale – Aimé Mpane

Résidence internationale – Aimé Mpane

La Fabrique de l’Esprit® initie ses résidences internationales avec l’artiste Aimé Mpane, de janvier à avril 2019, à la Cité Internationale des Arts. Le programme éducatif et artistique sera mené à ses côtés afin d’accompagner les migrants par l’expression artistique.

La résidence : Aimé Mpane

Né à Kinshasa au sein d’une famille d’artistes, le bois est son matériau artistique de prédilection. Formé à la peinture et à la sculpture à l’Académie des Beaux-Arts de Kinshasa et à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Visuels de La Cambe à Bruxelles, il partage son temps entre ces deux capitales. Sa pratique se nourrit des allers-retours entre son Afrique natale et son Europe d’adoption. Son travail révèle les conséquences du colonialisme et de la mondialisation tant sur l’identité individuelle que sur l’identité collective. Il illustre, avec force et humanisme, son désenchantement face à des problématiques qui semblent aujourd’hui impossible à résoudre.

« Mon travail est essentiellement basé sur la compréhension, l’interprétation de l’humain dans toutes ses dimensions et son implication dans notre société. Le bois reste mon matériel de base. Influencé par l’état de fragilité de la matière-bois et de l’homme de son humanisme, il me pousse à explorer tous ses aspects techniques et émotionnels.

Ma résidence sera basée sur l’interprétation de toutes sortes de frontière territoriale (d’ordre imaginaire, culturel ou historique). Ces frontières territoriales peuvent privilégier l’égoïsme solidaire de nos sociétés, l’hostilité ou l’agressivité à l’égard des autres peuples. »

Voir le site de l’artiste.

Le programme éducatif

Cette année, le programme d’éducation artistique se concentre sur l’inclusion des migrants, et a pour ambition de favoriser leur intégration et de restaurer leur confiance par l’expression artistique, afin de révéler leur talent, et de les insérer dans la société. Un dialogue s’inscrira entre l’artiste et ses publics, pour faire jaillir la création comme acte d’émancipation.

 

Pour suivre l’avancée de la résidence et du programmé éducatif, rendez-vous régulièrement sur notre site et nos réseaux sociaux : Facebook / Instagram

 

Visuel : Aimé Mpane, Bombe à retardement, 2010, sculpture en allumettes, rations de sachet d’alcool et vidéo.

 

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#L’œil Éclos n°6

#L’œil Éclos n°6

Cette magnifique femme à la peau ébène et élancée comme une guerrière dans cette nuée de souverains s’appelle Mamaguasca. Mamaguasca est une princesse africaine de ces pays qui n’existent plus.

Elle est belle, pas comme ces duchesses apprêtées. Elle est belle naturellement, sans fard, vêtue simplement d’une étoffe qui laisse apercevoir ses seins ronds.

C’est une princesse d’un autre temps. Ses bijoux ne brillent pas. Seul pend à son cou ce merveilleux collier que je ne pourrais jamais oublier. Ni or, ni diamants. Seulement cette terre cuite, qui comme cette femme, semble si solide mais pourtant si fragile à la fois.

Les reflets rouges si singuliers rappellent la terre et les épices de cette contrée d’un autre monde.

Mamagusaca n’est pas éternelle mais son collier symbole d’une vie est un humble souvenir de son passage sur cette terre, qui lui, a traversé les siècles.

Daphnée, 18 ans.

 

Mamaguasca, Amandine Arcelli, 2018, Isolant PVC, crépi, pigments, mousse, bouée, exposée à la Fondation Francès en 2018 dans le cadre du Lab.

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#ClubUnesco – Ecole de la paix #6

Promouvoir un monde habitable

« Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix » (Acte constitutif de l’Unesco – 1945)

Nous sommes là, d’abord, au cœur du grand débat sur ce qui relève de l’inné ou de l’acquis dans le comportement humain. Mais, plus récemment seulement – ce qui prouve déjà qu’il y a bien une évolution par rapport à un habitus de guerre aussi vieux que l’histoire des hommes ! – on s’est interrogé sur la pertinence du concept de « culture de la paix » dans notre monde d’aujourd’hui. Et ceci a bien fait débat au sein de cette organisation des Nations-unies elle-même.

Difficile de contester, en tous les cas, que l’art et la culture font bien partie d’un processus de fabrication de l’esprit, précisément. Et le genre photographique, par ce qu’il capture de l’humain et les facettes qu’il en dévoile, à l’image de ce regard sur le génocide rwandais nous permet de passer d’une expérience visuelle à la recherche, peut-être inavouée, d’un projet de vie. C’est ce que prétend la philosophe Corinne Pelluchon lorsque, voulant fonder une « éthique de la considération » (*) elle explique qu’il faut « dépasser l’analogie entre le bien et le beau » qu’il s’agit d’« enclencher un processus civilisationnel. » L’art est la composante d’une éthique de la considération, cette attitude globale qu’elle pare de toutes les vertus au point d’affirmer que, tel le David de Michel Ange, « elle défie les forces qui s’opposent à la créativité et à la vie. »

Au terme de cette première approche du rapport entre l’art et la paix, ne faudrait-il pas aller jusqu’à se demander : quelle recherche, quelle évaluation est possible qui permettrait de mesurer de combien la pratique artistique, cette démarche culturelle, peut contribuer à faire avancer le niveau de vie, le progrès humain et le « vivre-ensemble » ?

(*) « Ethique de la considération » Editions du Seuil, janvier 2018

Par Richard Pétris, Président de l’École de la paix, Grenoble (38), France

Visuel : Vêtemetns de victimes, Murambi, Rwanda

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#ClubUnesco – Ecole de la paix #5

Augmenter la réalité

Saisissons nous de l’actualité la plus brûlante. Cette photo de la reprise de Mossoul au groupe Etat Islamique en Irak qui fait terriblement penser aux fameuses gravures de Jacques Callot montrant « Les misères et les malheurs de la guerre » pendant la Guerre de Trente-Ans, mais rappelle aussi d’autres tragédies de notre histoire moderne, méritait certainement de recevoir un prix ! On peut se demander ce qui a le plus compté pour l’attribution du Visa d’Or par le Festival de photojournalisme de Perpignan en septembre 2017 : le témoignage de la réalité des affrontements et des civils démunis ou la qualité technique et artistique de l’image ?

Les deux, à égalité probablement. Les artistes que sont ces photographes nous proposent, en effet, des travaux qui méritent incontestablement d’être qualifiées d’œuvres d’art en même temps qu’ils mettent en scène des réalités, des expériences qu’ils veulent partager et qui susciteront un intérêt plus ou moins chargé d’émotion, dans une démarche où il sera aussi question de goût. Il s’agit bien d’une création artistique.

Cela ne ressemble-t-il pas à ce processus de réalité augmentée que permettent les nouvelles technologies d’aujourd’hui, l’image photographique jouant, en quelque sorte, le rôle d’une interface virtuelle qui vient enrichir la réalité en y superposant des informations complémentaires ? Dans quel but? L’objectif de l’appareil du photographe est à celui-ci ce que sont, par exemple, le pinceau au peintre ou le ciseau au sculpteur, mais avec une proximité encore plus forte avec cette réalité. Cet artiste-là ne serait-il donc pas naturellement plus militant et, à travers un imaginaire davantage sollicité, plutôt orienté vers la paix ?

Par Richard Pétris, Président de l’École de la paix, Grenoble (38), France

Visuel : Laurent Van der Stockt, Les damnés de Mossoul, 2017

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